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Le 13 février 2006, Ilan Halimi tombait sous la cruauté du « Gang des Barbares ». 10 ans après, et à l’occasion du triste anniversaire de sa disparition, le président de l’UEJF Sacha Reingewirtz revient pour nous sur cette affaire, ce qu’elle disait des préjugés. Et dresse un amer constat sur l’antisémitisme en France. Rencontre.
10 ans après l’assassinat d’Ilan Halimi, les préjugés antisémites restent tenaces. Comment les combattre ?
Sacha Reingewirtz : En travaillant sur le terrain, et en facilitant tous les projets de rencontres. Un sondage paru récemment dans « Le Parisien » montre les personnes qui fréquentent des juifs ont un degré de préjugé inférieur. Cela prouve que la rencontre, le dialogue, l’échange sont essentiels.
Le caractère de ce crime a-t-il été négligé au départ ?
S.R. : Sur le moment, oui, pendant quelques jours. Puis, finalement, les enquêteurs et les policiers se sont rendus à l’évidence. Cela a déclenché une prise de conscience de la société française. Avant l’affaire Ilan Halimi, il y avait un tabou. On ne pouvait pas parler de l’antisémitisme en France. Depuis, c’est devenu un sujet important dans le débat public. En 10 ans, nous avons beaucoup avancé sur la compréhension de ce phénomène de l’antisémitisme. Il y a beaucoup plus de français qui comprennent ce dont il s’agit.
On remarque qu’effectivement les élèves ont des théories complotistes qui leur viennent
On remarque qu’effectivement les élèves ont des théories complotistes qui leur viennent
Internet peut-il être un élément de propagation de l’antisémitisme en France ?
S.R. : Internet contribue grandement à la diffusion des préjugés antisémites. Il recycle des vieux préjugés, notamment sur la concurrence des mémoires, sur les accusations relatives au pouvoir, à l’argent, à travers des figures comme Dieudonné ou Alain Soral. Les grandes compagnies liées à Internet doivent être beaucoup plus fermes dans leurs modérations, et supprimer les contenus antisémites ou complotistes. On voit que dans les classes de collèges et lycées, il y a énormément de théories qui circulent.
Que pensez-vous du projet de Najat Vallaud-Belkacem de contrer les théories du complot qui circulent à l’école ?
S.R. : C’est un sujet dont il faut s’emparer. C’est bien que le ministère de l’Education nationale s’occupe de ce problème. Nous le faisons aussi. Nous travaillons beaucoup dans les classes avec l’association « CoExist », auprès des élèves de 4ème, 3ème et de seconde notamment. On remarque qu’effectivement les élèves ont des théories complotistes qui leur viennent. Elles ne sont pas contredites par les parents, ni par les professeurs, donc très souvent prises au mot. C’est très important d’en parler pour essayer d’illustrer l’absurdité de ces théories. Les théories du complot jouent beaucoup sur la crédulité des gens.
Ceux qui veulent utiliser la laïcité pour discriminer certaines populations font de la manipulation.
Ceux qui veulent utiliser la laïcité pour discriminer certaines populations font de la manipulation.
Est-ce aussi en raison de l’importation du conflit israélo-palestinien en France ?
S.R. : Malheureusement, oui. La transposition du conflit israélo-palestinien joue beaucoup sur cette dynamique du complot, et sur la montée de l’antisémitisme. Il y a des amalgames très importants qui sont faits entre israéliens et palestiniens. Mais la transposition n’excuse pas la violence. L’ancien président de « Médecins sans Frontières » Rony Brauman, réagissant à l’agression d’un enseignant juif à Marseille, disait que la kippa était une affiliation politique au gouvernement israélien. C’est complètement absurde car ce n’est absolument pas le cas. Et quand bien même cela le serait, ça ne justifie en rien le fait de vouloir massacrer un enseignant.
Voyez-vous la laïcité comme un trait d’union ou une barrière entre la République et la religion ?
S.R. : Un peu des deux. La question est de savoir comment on utilise cette laïcité, et à quelle fin. Ceux qui veulent utiliser la laïcité pour discriminer certaines populations font de la manipulation. A l’inverse, ceux qui voudraient profiter de la laïcité en se sentant autorisés à proférer des discours religieux extrémistes sont aussi dans l’erreur.
Des projets à venir ?
S.R. : Afin de continuer notre travail de dialogue et d’échanges, nous allons bientôt partir, accompagné de SOS Racisme, en Israël et en Palestine pour rencontrer des projets de médiation interculturelle entre ces deux populations. Nous voulons un état pour chacun de ces peuples, qui vivraient en paix en sécurité.
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Sujet important… surtout pour les juifs, non ? Le racisme est un sujet important. Le racisme sous toutes ses formes !