Les personnes séropositives continuent à subir des discriminations et à être victimes de préjugés, y compris dans la sphère intime. Sur les applications de rencontre, comme Grindr, la sérophobie est encore présente.
“Souvent, la sérophobie on la vit dans son coin“, nous explique Fred Colby, auteur et activiste dans la lutte contre le VIH, gay et séropositif depuis 2009. Environ 150 000 personnes vivent avec le VIH en France : autant de parcours et de préjugés face à leur statut sérologique, qui s’illustrent aussi dans la vie amoureuse et sexuelle. La sérophobie, selon Aurélien Beaucamp, directeur de AIDES, c’est “la peur de la personne qui vit avec le VIH”. “C’est un terme apparu dans les années 1990, à une époque où il y avait une méconnaissance des modes de transmission”, explique-t-il. Avec l’avancée des traitements et du dépistage, la sérophobie n’a pourtant pas cessé.

Fred Colby et Julien Ribeiro ont créé le compte Instagram “Séropo VS Grindr”, qui partage les propos violents que peuvent recevoir les séropositif.ve.s sur les applications de drague. “Comme je suis identifié séropo sur les réseaux, beaucoup de gays séropos m’envoyaient des captures d’écran. Je sentais une souffrance parce qu’ils se prenaient beaucoup de violence en n’étant pas forcément out”, nous détaille Fred Colby. Sur ce compte militant, les posts alternent entre dénonciation et pédagogie : “On s’est dit avec Julien que ce serait intéressant de pouvoir dénoncer ces messages, mais au-delà, déconstruire la sérophobie et réfléchir ensemble à de nouvelles façons de se draguer sans se blesser.”
“Demander à une personne si elle est propre pour lui demander si elle est séropositive, c’est très violent”
Parmi les réflexions de sérophobie ordinaire, il y a le “T’es clean ?”. “Clean, ça veut dire propre. Demander à une personne si elle est propre pour lui demander si elle est séropositive, ça sous-entend que les personnes séropos sont sales. C’est très violent“, affirme Fred Colby. D’autant que les personnes séropositives sous traitements ne transmettent pas le VIH : c’est ce qu’on appelle la charge virale indétectable.

Cette sérophobie, Fred Colby l’a vécue sur les applis de drague : “Parfois, juste en marquant ton statut sérologique, on te bloque.”
Au-delà du courage de parler de sa séropositivité, il y a le suivi médical assuré pour les personnes vivant avec le VIH. “Je pense que c’est plus safe d’avoir un rapport avec une personne séropo dépistée et traitée qu’avec quelqu’un qui n’est pas à jour dans son dépistage“, ajoute Fred Colby. Selon lui, le statut sérologique ne devrait pas être une question “à partir du moment où tu prévois ton outil de protection en amont“.
À l’occasion de la journée mondiale de lutte contre le VIH, AIDES a lancé la campagne “Pourtant je m’appelle” destinée à lutter contre les discriminations que vivent les personnes ayant le VIH. Selon Aurélien Beaucamp, “les discriminations font le lit de l’épidémie car elles empêchent l’accès au dépistage et au soin“. Dans la lutte contre la sérophobie, le directeur de AIDES affirme qu’au-delà de l’information, “il faut mettre en avant les personnes concernées, et ne rien laisser passer. Il faut arrêter de croire que les populations vulnérables sont hors de la population globale”. Pour Fred Colby, “l’information est là : abonnez-vous à 2 ou 3 comptes militants et vous allez voir que le VIH en 2020, ce n’est plus un souci médical quand on est dépisté et traité“.
La nouvelle campagne d’AIDES en vidéo :